Le travail présenté par Raymond Galle peut se concevoir comme une métamorphose, passage d’un état à un autre selon une conception et des méthodes artistiques fondées sur la transformation de l’existant.
Au point de départ il y a des affiches, enfermées dans des panneaux lumineux, comme on en voit dans toutes les villes du monde. Ces images sont des multiples, elles sont reproduites à des millions d’exemplaires afin d’être vues par des millions de personnes le temps d’une campagne publicitaire, un peu comme s’il s’agissait d’une exposition à l’échelle du pays. En général il s’agit de photos représentant des corps ou des visages humains associés à une marque ou à un produit, les premières étant destinées à faciliter la vente des seconds.
A l’arrivée il y a des peintures, pièces uniques d’où le message publicitaire a complètement disparu pour donner place à des portraits visibles en des lieux affectés aux expositions d’oeuvres d’art.
Ce travail est un exemple des relations complexes entre photographie et peinture. Ici, on part d’une photo pour arriver à une peinture, tout en restant à égale distance entre l’une et l’autre, mais en modifiant certains éléments du visage pour retrouver les archétypes sous-jacents. L’élimination du message publicitaire opère un glissement symbolique de la sphère marchande vers la scène artistique. En effet, alors que la photo d’un visage sur l’affiche sert à capter l’attention du consommateur sur le produit, la suppression de toute référence à une marchandise quelconque vise à redonner au visage toute son individualité de personne. En rendant singulier un visage tiré à des millions d’exemplaires, le peintre cherche à désactiver symboliquement le dressage publicitaire qui consiste à soumettre les existences aux modèles comportementaux standardisés de la consommation.